Ancien directeur général de la Banque Mondiale de 2013 à 2016, Bertrand Badré est le fondateur du fonds d’investissement Blue Like An Orange Sustainable Capital, consacré à la finance durable. Auteur engagé, il plaide pour une refonte du système financier mondial en faveur du développement durable.
Pas très bon… On est mené au score. Certes, dans nos économies, il y a eu des avancées. Même aux États-Unis, il ne sera pas possible de revenir intégralement en arrière sur la transition environnementale. Mais gare au « syndrome du bocal ». La planète entière n’a pas la même analyse de la situation que nous. Nombre de pays se trouvent aujourd’hui confrontés à une menace sécuritaire de court terme et il n’est pas concevable de leur faire la morale. Le sujet collectif de l’engagement du reste du monde n’a été qu’à peine effleuré…
Je pense à l’accord aussi inattendu que bienvenu sur la protection de la haute mer, signé par l’UE et 67 pays en 2023. On pourrait bien sûr dresser une liste de tous les échecs successifs, ceux des COP, les tentatives ratées de limitation du plastique… Mais il y a heureusement quand même des progrès.
Je salue les personnes qui, sur le terrain, continuent d’œuvrer au service de l’environnement loin des postures. Du côté des acteurs visibles, je trouve qu’il y a davantage d’ambiguïtés. Relevons tout de même ce qu’ont pu accomplir des gens comme Yvon Chouinard à la tête de Patagonia, ou comme Paul Polman, à la tête d’Unilever. La soufflante ? Elle serait en réalité méritée par beaucoup de monde !
Les Français sentent bien que les quelques centaines de millions de tonnes de CO2 qu’ils ont réussi à épargner à l’atmosphère ne pèseront pas lourd à l’échelle mondiale. C’est bien la difficulté : le soutien des supporters doit être planétaire et il y a autant de tribunes que de pays. Nombre d’entre eux doivent choisir entre fin du mois et fin du monde, on ne peut pas les en blâmer. Tout le défi est de parvenir à faire face au court terme, existentiel, sans perdre de vue le cap de notre sécurité collective à moyen et long terme.
Nous avons perdu la clé de la manière dont on transforme le système. Je suis inquiet de la désintégration de la volonté de coopération. Mais pour rester optimiste, reconnaissons que l’on n’a jamais disposé d’autant de moyens financiers, jamais compté autant de gens qui cherchent des solutions. Avec la volonté collective d’agir, celles-ci sont à portée de main.